Pourquoi la RDC s’accroche aux FDLR.

Antoinette K. Kankindi

Navarre, 30/08/07

 

Les événements immédiats qui se déroulent dans la RDC nous forcent à prendre tout le temps de la perspective pour en comprendre la portée et, ainsi, éviter de tomber dans le gouffre futur auquel nous poussent les décisions politiques irresponsables que prennent ceux qui ont reçu le mandat de restaurer la paix et la prospérité au pays. On a vu très tôt qu'ils n'étaient en rien intéressé par ces deux objectifs, à telle enseigne que si l'on voudrait compter les œufs cassés par les sbires du « porteur des œufs », on en finirait avec tous les poulaillers industriels s'il en existait au pays de Lumumba. Depuis l'arrêt des poursuites de FARDC contre les FDLR décrétés par l'Etat major des premières, on s'attendait à ce que les dernières prennent les positions auparavant occupées par les brigades mixées, ce qu'ils ont fait avec la violence qui les caractérise. Depuis la semaine dernière on nous met au courant de leurs activités meurtrières constamment. Dans l'entre-temps, encore une fois, une réunion de la fameuse tripartite plus un s'est tenu cette semaine à Kigali. Le problème à régler ne peut pas être plus clair : les forces négatives. Les journaux congolais, obsédés par une culture xénophobe, ont cessé d'identifier ces forces, à savoir les LRA qui ont commis des atrocités en Ouganda, au Soudan (d'où ils ont été chassés et se sont installés confortablement dans la Garamba), au Congo et les chouchous de Kabila et ses parlementaires originaires du Kivu, les FDLR. Les deux forces ont passé beaucoup de temps à tisser avec le pouvoir congolais des liens   qui les protègent et leur permettent d'avilir la population congolaise et d'attaquer leurs pays respectifs en même temps. Ce problème est très clair pour tout le monde, exception faite de la RDC qui s'accroche à ces forces négatives.

Après leur avoir donné le champ libre pour s'établir sur son sol et leur assurer l'impunité avec la complicité de la Monuc, on comprend que la RDC s'oppose si farouchement à la proposition prônée par le Rwanda, celle d'une opération militaire conjointe. La psychose en voie de devenir mythe que le pouvoir congolais nourrit contre toute opération militaire impliquant le Rwanda et l'Ouganda prouve que la RDC n'est pas mue par la prudence ni même la défense de la souveraineté territoriale. En effet, depuis Kahemba, nous savons que la souveraineté territoriale n'a plus de sens au Congo. La persistance congolaise à entretenir les FDLR et les LRA trouve une explication dans la mission que la RDC occupe dans le dessein de la France de déstabiliser les Grands Lacs. On ne le dira jamais assez.   Ce pays n'a pas d'autre alternative pour entrer en compétition avec le projet AFRICOM des Etats-Unis. La RDC, telle une sorte de mouton de panurge suit cette tendance. Les FDLR sont une carte que joue la France à travers le nouveau pouvoir au Congo. De cette manière elle fait d'une pierre deux coups : le génocide « inachevé » en 1994 et une présence militaire en concurrence avec l'AFRICOM. Mais tout en servant les intérêts étrangers qui n'ont pratiquement rien à voir avec la population kivutienne qui souffre et le sous-développement endémique qui gangrène le pays, la RDC doit se rendre compte qu'en amorçant l'offensive contre les seules forces qui combattaient les FDLR au Nord-Kivu, elle étale au grand jour son incapacité à se gérer et sa mauvaise volonté politique. Pourtant la situation ne requiert qu'un peu de diplomatie lucide, une fermeté face aux criminels connus et une détermination à poser les bases d'une coopération régionale capable de doter les pays respectifs d'un protagonisme positif sur la scène globale, avant que les corporations qui corrompent nos politiciens ne nous liquident ! A ce stade, toute option militaire ne devrait avoir qu'une seule raison : le retour des LRA et des FDLR dans leurs pays pour y entamer des pourparlers visant à trouver leur rôle dans la politique moderne de leurs patries respectives. Ce qui permettra au Congo de se reconstruire sur de nouvelles bases. Toute offensive contre les congolais, en lieu et place de ces forces négatives, est comme cela a été dit maint fois, suicidaire.

 

Quand les journaux à Kinshasa répètent la françafrique en disant que c'est le Rwanda qui a besoin d'une assistance pour son dialogue inter-rwandais, on se dit bien qu'on n'est pas sur la même planète. L'insécurité du Congo vient avant l'interférence dans les affaires des autres. Le Rwanda s'est déjà doté des mécanismes de son propre dialogue et, franchement, le Congo n'a pas de leçon à donner dans ce domaine, ni au Rwanda ni à aucun autre pays pour le moment. Si l'esprit de la CNS avait été maintenu, peut-être aujourd'hui le pays serait un exemple, mais hélas ce fut une occasion manquée ou gaspillée, grâce à certaines forces que nous connaissons tous.  

Aussi quand les journaux kinois publicisent la dernière trouvaille de Sarkozy, une autre réunion du conseil de sécurité sur l'Afrique, on en est ébahi. L'Etat major de la RDC vient de provoquer la débâcle à l'Est du pays en utilisant les FDLR contre Nkunda pour donner à la trouvaille de Sarkozy un semblant de vraie préoccupation pour l'Afrique. Sarkozy peut dire tranquillement que son pays doit « s'impliquer pleinement ». Et cela sonne comme un geste salutaire aux oreilles des journalistes. C'est le même journal de la francophonie à Kinshasa qui loue les interventions de la France en Côte d'Ivoire, en RSA et au Tchad, comme si la France avait vraiment apporté la paix dans ces pays ! Simplement ces journaux semblent oublier que Sarko est à la recherche des voix des chefs d'Etats de l'Afrique noire et leurs diplomates à l'ONU pour faire élire D. S. Kahn au FMI. Une finalité qui n'a rien à voir avec la sécurité à l'Est du pays. Celle-ci n'adviendra que quand Kinshasa saura compter avec les congolais de la place. La cause de Nkunda est la vraie piste vers la paix à l'Est: il ne faut pas l'esquiver et encore moins la combattre.

 

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