RDC : Kabila se trompe de cible à désarmer.

Antoinette K. Kankindi

 Orléans, 18 octobre 2007

 

 

mibale.jpgIl faut être un coureur de fond pour suivre les humeurs du Raïs dans les questions de l'Est.  Ce qui n'est pas un problème pour les North Kivutiens, surtout ceux de la partie montagneuse habitués à faire du marathon quotidien par monts et vallées de ce qu'on appelait autrefois la Suisse de l'Afrique Centrale. C'était avant que les amis du Raïs, les FDLR aient converti ce coin paradisiaque en lieu de cauchemar.   Ce qui scandalise pratiquement c'est la détermination que Joseph Kabila semble mettre à compromettre ou disons hypothéquer son tout prochain voyage aux Etats Unis par ses déclarations incendiaires. Il vient, il y a quelques heures, de dire aux journalistes que la huitième région militaire a le feu vert pour désarmer Nkunda. Disons-lui tout de suite, Raïs vous vous trompez de cible, et bien sûr, de priorité . Pis encore cette attitude est d'un mépris inacceptable et de mauvais goût vis-à-vis de la Communauté Internationale. Celle-ci non seulement a financé la transition, et les élections, mais aussi paie la Monuc que le président affirme utiliser contre Nkunda. Par cupidité et total manque d'éthique la Monuc a déjà montré qu'elle a abandonné sa mission de paix pour combattre les insurgés. Tenez-vous bien, elle n'a pas réussi à désarmer les FDLR depuis 1999, et maintenant elle appuie les FARDC-FDLR-FDLK dans leur dessein de liquider Nkunda   d'abord pour donner ensuite aux FDLR  ce dont elles ont besoin pour attaquer le Rwanda.

Il est très peu probable que réellement la Communauté Internationale veuille s'impliquer dans cette nouvelle manœuvre dictatoriale de Kabila, qui cherche noise aux pays voisins en plus de vouloir exterminer les Tutsis congolais le plus vite possible.   Avant d'aller à l'Assemblée Générale des Nations Unies , il avait gratifié le monde du même scénario d'ultimatum incendiaire . Se sent-il fort à ce point fort de l'appui de l'Angola auquel il est en train de céder Kahemba définitivement avec l'aide de la Belgique ? Ou est-ce encore la diplomatie française qui l'entraîne sur la pente génocidaire avec guerre régionale en perspective, et ainsi   mettre les Etats Unis devant un fait accompli irréversible ? Et le peuple congolais Tutsi ou pas ne compte pour rien dans tout cela ?

 

Ce que le Raïs semble oublier, c'est que la Communauté Internationale est en état de comprendre les enjeux mieux que lui. En plus elle a des intérêts qu'elle n'aimerait pas voir flamber juste pour les beaux yeux de l'homme fort de Kinshasa. Elle sait combien il est abusif de réduire les problèmes de l'Est à la seule insoumission du général Nkunda. Et d'ailleurs elle sait aussi que ses revendications sont légitimes, c'est pour cela qu'elle prône une négociation globale . Hier un communiqué de l'Union Européenne lançait encore à Kabila un appel pour un dialogue constructif. Elle lui rappelait également l'importance « de mettre un terme à la présence des FDLR, alliées de Kinshasa et d'œuvrer pour le retour des réfugiés ». Le communiqué soulignant aussi « qu'une approche exclusivement militaire des problèmes de l'Est ne fera qu'aggraver la situation, notamment sur le plan humanitaire. Et qu'une telle approche risque d'avoir des conséquences négatives pour la stabilité régionale » . On ne peut pas être plus clair.

 

Par ailleurs, un éminent observateur de la scène  congolaise vient de nous rappeler opportunément ce qui s'est passé la dernière fois où Joseph Kabila a supervisé des opérations militaires directement, à Pweto . Le Raïs aurait-il oublié que ce qui s'est passé là-bas est susceptible des poursuites devant la fameuse cour de la Haye ? Il ne devrait donc pas brandir sans réfléchir un mandat d'arrêt international. Tout comme son ministre de guerre ne devrait brandir à tout bout de champ l'exil pour quiconque ose s'opposer aux tendances dictatoriales du nouveau régime. Ce qu'il ont fait à Bemba ne peut et ne doit pas se répéter. On dialogue avec les opposant. On ne les élimine qu'en régimes totalitaires.

 

Une conférence de presse étant un événement en direct, sur le vif, cette fois-ci on ne peut pas le défendre en parlant d'interview fictif . C'est trop facile de parler de désarmer Nkunda contre l'opinion autorisée de la communauté internationale. C'est criminel de s'attaquer aux insurgés qui ne sont que des défenseurs des droits civils d'une minorité réellement menacée.   C'est se tromper de cible et de priorité. La seule façon de sécuriser le pays dépendant de la paix au Kivu. Et celle-ci doit passer par la neutralisation de FDLR : voilà la cible et la priorité. Tant que les FDLR seront là, même s'elles font partie des FARDC, la position de Nkunda sera justifiée, n'en déplaise au Raïs. On peut donc prendre ses déclarations d'aujourd'hui à la presse  comme une provocation dangereuse parce qu'au lieu d'éloigner le spectre de la guerre, elles le ravivent. Qui va financer cette guerre ?  N'est-ce pas la même communauté internationale qu'il ne veut pas écouter.

 

 

De toute façon, on se demande bien qui a conseillé le président de prendre cette dernière decision ? On peut supposer que c'est Delphin Kahimbi en mal de gloire et qui la sent déjà si proche avec le succès de la coalition FARDC-FDLR-FDLK à Karuba et Rubaya. Mais aussi on pourrait penser à quelque éminence grise au sein de la Monuc, obéissant à la « françafrique », et dans tous les cas, à la recherche de l'extension de leur mandat. Encore une fois, faisons le constat amer, on n'est pas sorti de l'auberge cauchemardesque.

 

 

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