Affaire Nkunda, le schéma qui fait peur.

(KGM)

06/11/07

 

Plusieurs officiels congolais se sont récemment réjouis de l’implication de Washington dans la résolution de la crise de l’Est de la RDC, qui se cristallise de plus en plus autour de la dissidence du général déchu Laurent Nkunda. Selon les mêmes sources, le soutien renouvelé de l’administration Bush à l’égard des autorités congolaises devrait se traduire par le lâchage concomitant du leader du CNDP et une aide plus appuyée aux forces armées de la RDC.

Propositions

Selon des sources diplomatiques, cette vision devrait être relativisée, au moins pour cette raison essentielle qu’on verrait mal le gouvernement américain s’impliquer dans une solution qui ne serait pas globale, c’est-à-dire comprenant également la résolution de la question des forces négatives. Les mêmes qui écument la région des Grands lacs et qui constituent un appel d’air pour des apprentis terroristes à la recherche des zones de conflits pour se camoufler et se réorganiser. C’est du reste dans ce sens qu’il faut interpréter le soutien de Washington à la Tripartite Plus regroupant le Burundi, l’Ouganda, la RDC et le Rwanda.
Si l’on en croit la presse internationale, notamment le « Tageszeitung » (Allemagne) daté du samedi 3 novembre, le schéma américain comprendrait plusieurs propositions que les diplomates de Washington – qui se relaient dans la région – ont pour mission de faire passer auprès de tous leurs interlocuteurs. Un : Laurent Nkunda irait en exil, qui serait provisoirement l’Afrique du sud. Deux : une force d’intervention rapide, entraînée et commandée par des Américains, se chargerait de la chasse aux Fdlr, afin d’évacuer toute menace contre le Rwanda. Trois : la présence américaine constituerait une garantie sécuritaire pour les « Tutsi » au Nord-Kivu. Quatre : les Etats-Unis s’engageraient à réorganiser les principales bases de l’armée congolaise, notamment Kamina et Kitona. Cinq enfin : Washington disposerait d’un poste diplomatique permanent à Goma.

Nouvelle donne

Le succès ou non du récent séjour américain du Président congolais devrait ainsi s’apprécier par rapport à la question de l’Est, au regard des réponses apportées par l’administration Bush au cahier des charges des Congolais. En l’occurrence, à part l’exil, qui risque d’être doré pour le général du CNDP, les propositions ainsi exprimées pourraient en réalité se traduire par une prime pour Laurent Nkunda, de la même manière qu’ont été primés tous les rebelles qui, depuis 1997, sont devenus des leaders et des démocrates à part entière. De même, la constitution d’une force d’intervention rapide grâce à des unités fournies aussi bien par Laurent Nkunda que par les Fardc ne serait qu’une version revue et corrigée du mixage pourtant rejeté par la plupart des Congolais.
Plus surprenante serait la garantie sécuritaire en faveur des Tutsi. En fait, une façon élégante de donner un statut spécial à cette communauté et donc de la dresser contre les autres ethnies. Donc, tout le contraire d’une démarche fondée sur la tolérance mutuelle entre les groupes ethniques et la réconciliation nationale. Il en est de même de l’accent mis sur la chasse aux Fdlr comme menace à la sécurité du Rwanda, sur le même mode que les déclarations généralement faites sur les collines de Kitchanga et à Kigali.
Enfin, on ne voit vraiment pas comment les Congolais pourraient s’accommoder d’une présence diplomatique permanente américaine à Goma, sans accréditer la thèse d’un démembrement progressif de la RDC au profit d’un nouveau Kosovo qui ne dirait pas son nom. Evidemment, il reviendra au gouvernement congolais de se prononcer sur toutes ces propositions, en séparant le bon grain de l’ivraie, sans chercher à s’abriter derrière un appui américain qui serait en réalité l’arbre cachant la forêt.

 

 

Le  Phare

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