Assemblée nationale: Lutundula démissionne !

Joachim Diana Gikupa

25/02/2009

 

christophe_lutundula.jpgChristophe Lutundula a démissionné. Le clan politique au pouvoir n’a fait aucun reproche personnel à ce constitutionnaliste qui a fait ses preuves. Comme 1er vice-président du bureau de l’Assemblée nationale, il a démontré que chacun doit être à sa place. Et pourtant, Christophe Lutundula aurait pu aussi être le numéro un du bureau. C’est le contraire de ceux qui croient être là où ils sont par défaut et que leur place devrait être la première loge du pouvoir.

Lutundula est également le contraire de ceux qui se considèrent comme partenaires là où ils sont appelés à jouer le rôle précis. Dans le cas d’espèce, si le chef de l’Etat a des partenaires au niveau de la famille politique, au niveau des institutions il est le chef, le garant de la Nation. Quiconque ignore cette réalité n’est pas à sa place ou n’est pas capable d’être là où il est. La compétence, c’est aussi la capacité de ne jouer que son rôle.

C’est comme en football. Lorsqu’un défenseur se confond au gardien de but et prend le ballon avec les mains, c’est une pénalité. Si la faute est commise dans le rectangle fatal, c’est penalty. C’est le cas de Vital Kamerhe qui a fait l’anti-jeu dans le rectangle fatal. En démissionnant à la demande de ceux qui lui avaient fait confiance, Christophe Lutundula s’est montré digne de cette confiance.

Le fil indien

On peut en dire autant du Questeur adjoint et du Rapporteur Katende wa Ndaye. Il nous revient qu’en séjour à l’étranger, le rapporteur de l’Assemblée nationale enverra dans quelques heures – si ce n’est pas déjà fait – sa démission. On sera surpris que Marc Mvwama, 2ème vice-président fasse de la résistance. Selon nos sources, il pourra lui aussi honorer son parti politique le Palu en démissionnant. Quitte au Palu de lui renouveler cette confiance. Quid de la décision de Modeste Bahati ? On n’a aucun écho de l’état d’esprit du Questeur que d’aucuns jettent, à tort peut-être, dans le camp de la résistance. Modeste Bahati pourra aussi surprendre, si on peut appeler cela surprise.

La question que plus d’un se posent est de savoir ce qui en adviendra de Vital Kamerhe resté au bureau seul comme une perdrix sans enfants ? Ce sera l’occasion de recourir aux textes qui régissent le pays et particulièrement l’Assemblée nationale. Mis dans cette situation, le bureau devra se renouveler. Cela veut dire que les partis politiques membres de la majorité vont présenter des candidats à tous les postes dont celui de président du bureau. Il reviendra à Kamerhe de se représenter comme indépendant, dans la mesure où son clan politique, aussi bien le Pprd que l’Amp, lui ont retiré la confiance.

Une désinformation a fait croire que Christophe Lutundula aurait retiré sa démission. Joint au téléphone par la rédaction de L’Avenir, Christophe Lutundula a démenti cette désinformation. Il a fait savoir qu’effectivement, il avait envoyé sa secrétaire pour retirer sa lettre de démission afin d’aller la remettre lui-même et en mains propres à Vital Kamerhe parce qu’il n’avait pas la confiance du secrétariat de ce dernier. La suite des événements lui donne raison. Car, juste après, voyant venir le directeur de cabinet de Vital Kamerhe, il lui avait remis cette lettre avec recommandation de la remettre au président de l’Assemblée nationale en mains propres.

Bien plus, se trouvant en présence de Kamerhe lui-même, il lui a remis une copie de cette lettre. Pour quelle raison a-t-on dit à la presse que Lutundula avait retiré sa démission ? Est-ce le travail d’un secrétariat dont le rôle est d’enregistrer ? Le même bureau du président de l’Assemblée nationale soutient que Kamerhe ne démissionnera que devant la plénière. On peut se poser la question sur l’exactitude de cette déclaration.

Et si Kamerhe allait jusqu’au bout ?

L’opinion se demande ce qui en adviendrait au cas où, Vital Kamerhe se ferait élire. Il faudra alors considérer la motivation qui avait poussé le clan politique à retirer la confiance à Vital Kamerhe. Si c’était pour amuser la galerie, on laissera faire. C’est comme dans nos ensembles musicaux avec Adjani qui part de Wenge Maison Mère et qui revient. Ou encore ce sera comme dans nos clubs de football avec l’entraîneur Mukeba qui part et qui revient.

La Rdc n’étant ni un orchestre ni un club de football, en cas d’élection de Vital Kamerhe en dépit du retrait de la confiance par son clan politique, il faudra repréciser la majorité. Il faudra passer la question au scanner. S’il est constaté que la majorité n’existe plus, il faudra la recréer. Et le Chef de l’Etat a le pouvoir constitutionnel de renvoyer l’actuelle Assemblée nationale. Et on se pose la question de savoir s’il est aisé de recourir à cette disposition constitutionnelle lorsqu’on sait que l’on n’aura pas les moyens d’organiser des élections anticipées. Ceux qui se posent cette question ne proposent aucune autre alternative qui serait en harmonie avec la Constitution si ce n’est que demander de laisser Vital Kamerhe à sa place.

Ce sont justement ceux qui croient que l’on est dans l’univers des débats entre Werra et JB, Wazekwa et Koffi, et que sais-je encore. Si la majorité laisse Vital Kamerhe en place après avoir dit tout ce qui a été dit à son sujet, elle nous poussera à nous poser des questions notamment celle sur la nécessité de disposer d’une majorité au parlement lorsqu’on veut gérer le pays. Ce sera la première majorité qui aura un opposant à la tête du bureau de l’Assemblée nationale. On va peut-être très loin. On ignore peut-être le sentiment très profond qui habite actuellement Vital Kamerhe. En attendant, puisqu’il n’est pas encore trop tard, rien n’exclut que Vital refusera d’engager un bras de fer inutile. S’il ne démissionne pas formellement, il n’est pas exclu qu’il se retienne de se représenter au poste de président de l’Assemblée nationale sans le mandat de son clan politique.

Si Jean Ping s’en mêlait

Dans une certaine opinion, on croit tellement (à tort) à la faiblesse morale dans nos institutions qu’on va jusqu’à penser que faire partir un président d’une Assemblée nationale est un péché qui mérite la mobilisation du monde afin d’être absout. Ainsi interprète-t-on le périple américano-euro-sud-africain de Vital Kamerhe comme une mobilisation des soutiens. Très vite, on croit que c’est pour demander au Pprd de garder Vital Kamerhe à la tête de l’Assemblée nationale que le président de la Commission africaine, le Gabonais Jean Ping, a fait le déplacement de Kinshasa. Tout sauf cela. Le président de la Commission africaine aurait-il pour mission de faire immixtion dans la gestion quotidienne des partis politiques ? Qui s’imaginerait que le président de la Commission européenne se permette d’aller voir ce qui se passe au Ps en France ?

Si, comme on semble le faire croire dans une certaine opinion que le président de la Commission africaine serait à Kinshasa parce qu’il y aurait risque de dissolution de l’Assemblée nationale, cela peut effrayer. La communauté internationale qui a financé les élections en Rdc et qui n’est pas prête à mobiliser encore de l’argent pour des élections anticipées en Rdc, enverrait Ping pour demander le maintien de Kamerhe afin d’éviter des élections anticipées. Si vraiment tel est le cas, non seulement nous refusons d’y croire, mais aussi, c’est un cas aggravant pour le président de l’Assemblée nationale. Ceux qui l’accusent de se considérer comme un co-président de la Rdc ne chercheront plus des arguments.

De quel droit un homme peut-il refuser de remettre un mandat qui lui a été remis au point de vouloir mobiliser le monde entier sur son sort ? Heureusement que tel n’est pas le cas. Jean Ping a bien de choses plus importantes à régler en Rdc que de s’occuper de Vital Kamerhe. Il nous revient des milieux proches de l’actuel président de l’Assemblée nationale que Vital Kamerhe entend démissionner en direct à la télévision nationale, devant les ambassadeurs et chefs des missions diplomatiques et autres représentants des institutions internationales. Tant mieux !

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