Génocide au Rwanda: un chercheur anglais accuse la France de complicité de crime de génocide.

Reuters

04/05/2007

genocide_du_rwanda.jpg"Silent Accomplice" ("Complice silencieux"), du chercheur britannique Andrew Wallis, apporte de nouvelles preuves de la complicité française dans le massacre de Tutsis et de Hutus modérés par des milices formées par le gouvernement hutu soutenu par Paris.

Des militaires français ont expliqué aux extrémistes hutus comment cacher les preuves de leurs atrocités aux satellites espions, affirme l'auteur d'un nouvel ouvrage sur le génocide de 1994 au Rwanda.

"Leur rôle est assez clairement identifié, leur rôle est celui de complice de crime de génocide", insiste Andrew Wallis.

D'après Andrew Wallis, certains militaires étaient agacés par la vue des corps flottant dans les cours d'eau, ce que pouvaient saisir les satellites espions.

"Alors les soldats français leur disaient 'vous devez ouvrir les ventres de ces Tutsis que vous tuez afin qu'ils coulent et que les satellites ne les voient pas'", a déclaré Wallis à Reuters, à Kigali.

La rivière rwandaise Akagera se jette dans le lac Victoria et elle a charrié des milliers de cadavres vers l'Ouganda voisin au moment des massacres. Des Ougandais affirment avoir retrouvé des dents humaines dans leurs poissons après le génocide.

"PREUVES MANIFESTES"

Wallis juge que l'implication française va bien au-delà de simples accords avec le gouvernement et que, avant et pendant le génocide, les forces spéciales françaises ont armé et formé des soldats devenus ensuite des miliciens responsables de la plus grande partie des massacres.

"Leur rôle est assez clairement identifié, leur rôle est celui de complice de crime de génocide", insiste Wallis.

"De septembre 1993 jusqu'au moment du génocide, les services secrets français au Rwanda ont participé à la surveillance des rebelles du Front patriotique rwandais. Leurs militaires commandaient de fait les forces militaires rwandaises.

"Ils acheminaient des armes, ils acheminaient des radios, ils contribuaient à financer tout cela et ils ont poursuivi ces opérations même après que ce gouvernement fut vaincu."

Cet auteur britannique a témoigné devant une commission rwandaise enquêtant sur le rôle de la France dans cette période.

Les autorités françaises ont déjà démenti de précédentes accusations formulées par Wallis.

Le Rwanda a rompu ses relations diplomatiques avec la France en novembre, en reprochant aux autorités françaises de ne pas reconnaître leur rôle dans la mort de 800.000 personnes en 1994.

Le Rwanda intente depuis avril une action devant la Cour internationale de justice (CIJ).

Cette initiative fait suite à la décision en novembre du juge Jean-Louis Bruguière de lancer des mandats d'arrêts contre neuf proches du président Paul Kagamé pour "complicité d'assassinat" de son prédécesseur Juvénal Habyarimana. La mort de ce dernier en avril 1994 dans la chute de son avion est considérée comme l'élément déclencheur du génocide.

D'après Wallis, le gouvernement provisoire créé après la mort de Juvénal Habyarimana et considéré comme responsable des massacres, a été formé à l'ambassade de France.

"Il y a des preuves manifestes d'un soutien politique français à un gouvernement provisoire qui était en train de tuer son propre peuple", dit le chercheur britannique.

Par Arthur Asiimwe

Un soldat belge a aussi accusé les Français d’avoir formé des génocidaires

Un ancien officier belge de la Mission des Nations unies aux Rwanda (MINUAR), le colonel à la retraite Walter Ballis, a accusé, lundi, des soldats français d’avoir entraîné militairement les miliciens Interahamwe, principaux bras armés du génocide de 1994, a rapporté mardi l’agence rwandaise d’information (ARI).

Le colonel Ballis, qui était chef adjoint des opérations à l’état-major de la MINUAR, a fait cette déclaration lors de sa déposition devant la Commission rwandaise d’enquête sur le rôle présumé de la France pendant le génocide de 1994.

"Notre cellule des renseignements faisait état de camps d'entraînement où des instructeurs français apprenaient aux Interahamwe des éléments de combat et de la guerre", a témoigné l’officier belge cité par ARI.

"Au cours des briefings journaliers, elle signalait la présence des gens du Détachement d'assistance militaire, (DAMI). Nous n'étions pas autorisés à les arrêter ou même à leur demander ce qu'ils faisaient à Kigali", a-t-il précisé.

"Une fois, (le général) Roméo Dallaire (commandant de la MINUAR, ndlr) a envoyé une patrouille après qu'il avoir reçu des informations faisant état d'entraînements des Interahamwe par des instructeurs français au nord de l'aéroport de Kigali", a relaté le témoin.

"Arrivés sur place, ils (les casques bleus de la MINUAR) n'ont vu personne", a indiqué Ballis, expliquant que les instructeurs français avaient certainement été avertis de l’arrivée de la patrouille MINUAR.

Selon lui, des soldats français sont restés au Rwanda déguisés en civils alors que leur contingent avait officiellement quitté le pays à la mi-décembre 1993.

"Certains Français, censés avoir quitté le Rwanda à la mi- décembre 1993, s'étaient déguisés en civils et ont continué à faire ce qu'ils faisaient avant. J'ai reconnu un d'entre eux que j'ai rencontré à l'Hôtel Méridien", a dit le colonel Walter Ballis, qui a affirmé avoir été surpris de constater le 09 ou le 10 avril 1994 que son uniforme de militaire belge avait disparu de l’hôtel Méridien où il logeait et en a conclu qu’il avait été volé.

Le colonel Ballis a indiqué que des témoignages faisaient état de la présence de militaires habillés en uniforme belge mais portant des bérets de l’armée française dans la nuit du 6 avril 1994 à Masaka, la colline d’où auraient été tirés les missiles qui ont abattu l'avion du président Juvénal Habyarimana.

Sans désigner explicitement les Français comme responsables de l’attentat, il a déclaré que les missiles qui ont été utilisés pour abattre cet avion n'existaient pas dans l'arsenal belge à cette époque.

"Je doute fort que les ex-Forces armées rwandaises (ex-FAR) du président Habyarimana disposaient de ces missiles, moins encore le Front patriotique rwandais (FPR, ex-rébellion, actuellement au pouvoir), a-t-il indiqué.

"Ce n'est pas la France qui a commis le génocide, ce ne sont pas les Hutus comme ethnie qui ont commis le génocide. Dans chaque groupe de personnes, il y a de malins génies. Dans les hautes sphères de la politique française, il y a eu des gens qui ont eu des idées mauvaises sur le Rwanda", a-t-il conclu.

 

Reuters

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