RDC: 2006, une année d´attaque contre la presse selon le CPJ.

Nathalie Mbenga

14/02/07

mokominaboloko.jpg«Au cours de l’année qui vient de passer, j’ai couvert l’actualité en Irak, en Afghanistan, au Liban, en Israël et en République démocratique du Congo. Dans chacun de ces pays ravagés par la guerre, j’ai rencontré des journalistes locaux qui font face tous les jours à des situations que beaucoup d’entre nous en Occident ne peuvent tout simplement pas imaginer. Non seulement ils font face aux menaces qui pèsent sur leur propre vie, mais aussi sur celle de leur épouse, de leurs enfants», tels sont les propos d´un témoin repris dans le rapport 2006 sur la liberté de la presse dans le monde, publié par le CPJ (Comité pour la protection des journalistes). "Attaque contre la presse", tel est le titre de ce rapport qui passe en revue la situation de la liberté de la presse dans plus de 100 pays. La RDC, est également reprise sur la liste.

En République démocratique du Congo, Selon le rapport, une corruption massive et une absence complète de protection judiciaire permettent à des bandits armés d’agir en toute impunité. Des dizaines de milliers de femmes ont été violées et leurs agresseurs ont rarement été arrêtés. Des journalistes sont tués ou menacés et il n’y a pas d’enquête, pas de justice. Silence. Le meurtre du journaliste indépendant Bapuwa Mwamba dans les semaines qui ont précédé d’historiques élections nationales, a jeté un sévère coup de froid dans les médias, alors que ceux-ci faisaient déjà face à de fréquentes attaques et intimidations. Mwamba était le second journaliste abattu chez lui en huit mois. Les attaques contre la presse se sont nettement accentuées durant la dernière ligne droite de la campagne pour les élections législatives et présidentielles du 30 juillet. Mwamba est mort d’hémorragie après avoir été abattu par des hommes ayant surgi dans sa maison aux premières heures du 8 juillet. Selon des sources locales, ses agresseurs ont seulement pris un téléphone portable. La veille de sa mort, il avait publié un commentaire dans le quotidien indépendant "Le Phare" critiquant les autorités congolaises et la communauté internationale au sujet de la transition politique qu’il qualifiait d’échec. La raison de sa mort demeure incertaine et le CPJ continue d’enquêter sur ses circonstances. Ce n’est qu’en juillet, quelques jours après la mort de Mwamba, que s’est ouvert le procès de trois militaires pour le meurtre d’un autre journaliste, Franck Ngycke Kangundu, et de sa femme, Hélène Mpaka, en novembre 2005. La police avait présenté les trois suspects à la presse le 21 novembre 2005. Les médias gouvernementaux avaient indiqué le même jour que le mobile du crime était le vol, selon l’association locale pour la liberté de la presse, Journaliste en Danger (JED). L’élection présidentielle, qui a donné lieu à un second tour en octobre, a notamment attisé les divisions. Les journalistes ont été victimes de violence, de censure et de détention arbitraire tantôt par les forces gouvernementales, les factions politiques et des groupes de voyous. Les autorités ont expulsé un correspondant étranger. Dans un pays ravagé par la guerre et miné par la corruption, le système judiciaire n’a fourni guère de protection contre ces violations. Certains médias on nourri les tensions politiques avec des reportages partisans et incendiaires. La menace d’emprisonnement à la suite d’écrits, basée sur de vieilles lois pénales, a été constante chez les journalistes locaux. Ceux écrivant sur des allégations de corruption et des violations de droits de l’homme ont été les plus en danger. Plusieurs reporters, rédacteurs en chef et directeurs de publication ont été détenus pendant quelques semaines ou mois, parfois sans charge et souvent sans procès. A Kinshasa, des agresseurs armés ont cassé et pillé du matériel de Radiotélévision Message de Vie (RTMV), la forçant à cesser d’émettre. Selon plusieurs sources du CPJ, les agresseurs, bien qu’en tenues civiles, étaient des agents de sécurité de l’Etat. Un reportage posté sur le site Internet de Radio Okapi affirmait que c’étaient des policiers. Cette attaque est survenue après un rassemblement du pasteur évangéliste Fernando Kuthino, dont l’église est propriétaire de RTMV. Kutinho a été emprisonné après avoir exprimé des opinions politiques lors du rassemblement. En effet, ce rapport de 56 pages met également un accent particulier sur le rôle de l´Union Africaine. Selon Julia Crawford, auteur de l´article, en juillet 2006, alors que les chefs d’Etat africains se réunissaient à Banjul, la tranquille capitale balnéaire de la Gambie, leur hôte venait de fermer un renommé journal privé, de jeter en prison des journalistes et d’empêcher un projet de forum sur la liberté d’expression en marge du sommet. Au cours de ce sommet, l’Union africaine (UA) a fait prêter serment aux juges d’une future cour panafricaine de justice pour les droits de l’homme. Mais elle est restée silencieuse aussi bien sur les violations de ces droits en Gambie que sur celles des droits des personnes qui y sont emprisonnées. Julia estime que l´Union Africaine échoue à défendre la liberté de la presse. «Le silence de l’UA contre les violations de la liberté de la presse tandis qu’elle siège dans les capitales de deux des principaux violateurs sur le continent – la Gambie et l’Ethiopie – jette un doute sur son engagement à promouvoir la liberté d’expression», a-t-elle ajouté. Pour elle, l´UA constitue aussi un potentiel instrument de promotion de la liberté de la presse à travers le continent.

 

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