RDC: “Scandales financiers” dénoncés par des élus.

Marie-France Cros

05/02/10

 

La commission Ecofin de l’Assemblée nationale a dénoncé la “dilapidation” de fonds publics. Des remboursements de dettes douteuses en cause.

En novembre dernier, la commission Economie et Finances de l’Assemblée nationale à Kinshasa s’est inquiétée de "scandales financiers". Les élus s’indignaient particulièrement du remboursement de la dette intérieure de l’Etat congolais à quelques entreprises seulement, au détriment des autres, remboursement qui, en outre, induisait le soupçon quant à sa régularité. "Seules deux entreprises, sur la multitude qui attend, ont bénéficié de paiements, jusqu’au dépassement de 502,4 % de la ligne budgétaire", notaient les commissaires.

Les deux entreprises en question sont la Banque congolaise (héritière de la Fransabank libanaise, qui avait récupéré les actifs de l’ex-UZB), en difficultés financières, et Emaxon, la société du diamantaire israélien Dan Gertler.

Les parlementaires s’indignent ainsi, dans un document du 15 novembre, de ce que le ministre des Finances, Athanase Matenda, et le président de la Banque centrale, Jean-Claude Masangu, ont remboursé la Banque congolaise, alors, estiment-ils, qu’elle avait acquis des créances "douteuses"et même "toxiques" – achetées, qui plus est, par la Banque congolaise grâce à "d’énormes prêts" à 24 mois accordés par la Banque centrale.

Les parlementaires rappellent que les deux excellences citées "savent que toutes les créances antérieures à 2001 devaient être certifiées et soumises à la décote" de 80 % convenue avec la Banque mondiale, chargée de les liquider au sein d’une enveloppe de 85 millions de dollars.

Et les élus de s’interroger sur les raisons qui ont poussé les deux excellences citées à "s’apitoyer"sur la Banque congolaise sans "observer la même bienveillance à l’égard de l’UBC", dont l’État congolais détient "une part significative du capital".

Le même travail est effectué par les parlementaires de la commission Ecofin de l’Assemblée pour le dossier Emaxon. Détentrice d’une "créance de 14 millions de dollars", la société du diamantaire israélien a reçu pour remboursement "un billet à ordre de 25 millions de dollars".

Les parlementaires contestent en outre la créance de 14 millions, dont 10 millions ont servi à Emaxon pour acheter du matériel à la Miba (société semi-publique diamantaire, au Kasaï oriental) alors qu’ "en fin de compte, le matériel livré s’est révélé inadapté et continue à moisir dans les installations de la Miba". Or celle-ci, s’indignent les parlementaires, a été "sommée de rembourser la contre-valeur d’un matériel inapproprié et inutilisé mais en plus à payer une pénalité arbitraire et non convenue au départ de 4 millions de dollars à Emaxon". Cette dernière, relèvent les commissaires, a pourtant profité durant plus de quatre ans d’un contrat lui octroyant l’exclusivité de l’achat de 88 % des diamants produits par la Miba "au prix léonin et fixe de 13 dollars le carat alors que le prix oscillait autour de 24,41 dollars le carat sur le marché" , situation qui a occasionné "un manque à gagner énorme" pour l’entreprise semi-publique.

"Logiquement", estiment les parlementaires, "c’est Emaxon qui devait indemniser la Miba pour lui avoir livré un dragline hors d’usage alors qu’Emaxon tirait de gros bénéfices (du) contrat de vente exclusive des diamants. L’imputation de la contre-valeur de ce matériel, ainsi que les pénalités à charge de l’État congolais, par le ministre des Finances, est une dilapidation des fonds publics en violation de la loi de finances et de la procédure en matière de paiement de la dette publique. Plus grave, le ministre des Finances a carrément ordonné à la Banque centrale du Congo d’émettre un billet à ordre de 25 millions de dollars en faveur d’Emaxon".

Onze autres dossiers ont attiré l’attention des commissaires. Toutefois, il semble que toute cette affaire, pour laquelle ces derniers voulaient auditionner aussi le Premier ministre Adolphe Muzito, ex-ministre du Budget, n’est pas à l’ordre du jour de la session extraordinaire de l’assemblée en cours (janvier-février).
lalibre.be

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