Invasion de la RDC par l’Angola, le rôle actif et passif du gouvernement congolais.

Kiupeace

12/03/07

edouardo_kabila.jpgLe territoire national congolais est sous occupation étrangère depuis plus d’un mois déjà. Les informations en provenance des diverses sources se recoupent et se contredisent en même temps, mais toutes confirment l’occupation des plusieurs localités du territoire de KAHEMBA dans la province de Bandundu par l’armée régulière angolaise sur une étendue d’environ 20km à l’intérieur de la RDC. Aujourd’hui la simple occupation du territoire national par quelques policiers angolais, à en croire le gouvernement congolais, s’est transformée en une véritable invasion de l’armée angolaise traduisant ainsi, clairement, des prétentions territoriales de la République d’Angola sur l’espace territorial de la RDC.

Pour lever toute équivoque sur les intentions du gouvernement angolais dans cette démarche, le gouverneur de la province angolaise de Luanda-Norte, Francisco Gomes MAIATO n’a pas mâché les mots lorsqu’en visite d’inspection administrative dans le territoire occupé la semaine dernière, il affirmait : « Ce territoire fait partie intégrante du territoire angolais ».

En confirmation de l’autorité angolaise sur cette partie du territoire national congolais, le drapeau angolais a été hissé et flotte, depuis lors, à la source de la rivière KAKAMBA, reconnue ‘’place-forte’’ de Kahemba grâce aux nombreuses pierres précieuses que cette rivière contient.

Nous apprenons également en dernières minutes que des infiltrations de l’armée régulière angolaise se poursuivraient à d’autres endroits à l’Est comme à l’Ouest de Kahemba en direction des provinces du Bas-Congo et du Katanga.

La précipitation de ces événements a semblé surprendre les autorités congolaises qui, tout au début des événements, avaient minimisé les faits qu’ils ont d’abord qualifiés de « petit incident créé par un sous-officier de la police angolaise » pendant que des nombreuses sources parlaient de l’invasion du territoire national par des bataillons surarmés de l’armée angolaise à Kahemba. Cette position du gouvernement congolais traduit en même temps son rôle actif et passif depuis le début des événements ; rôle qui aura eu un effet favorisant sur la situation à Kahemba, au moment où des signes avant-coureurs connus et clairs servaient d’indicateurs à la préparation d’une invasion angolaise :

1. Expulsion des dizaines des milliers des congolais

expulses2.jpgDepuis 2005, la République d’Angola s’est servi de la situation de confusion à la frontière entre les deux pays pour procéder à l’expulsion des congolais sur son sol sous le fallacieux prétexte de séjour irrégulier ou mieux de sans papier. Pourtant les conditions dans lesquelles ces opérations étaient menées laissaient à désirer. Les expulsés étaient d’abord arrêtés, dépouillés de tous leurs biens y compris des documents migratoires, torturés pour ensuite les ligoter avant de les jeter à la frontière de la RDC sans pour autant aviser les autorités congolaises qui, très souvent étaient surprises, plusieurs mois après leur expulsion, de la présence sur la frontière des dizaines des milliers des congolais.

Très souvent l’état de santé des expulsés avait atteint un stade très avancé de détérioration, ce qui entraînait d’ailleurs la mort de ceux qui ne pouvaient plus se remettre de leurs blessures issues de plusieurs jours de marche ou de sévices corporels soutenus.

Plusieurs organisations non gouvernementales avaient fait écho des pratiques inhumaines et dégradantes dont faisaient preuve les agents angolais affectés auxdites opérations, des cas de viol et autres violences sexuelles sur des femmes et des jeunes filles mineures étaient rapportés, d’autres sources angolaises avaient rapporté que plusieurs autres congolais croupissaient dans des geôles des services de renseignement ou des migrations angolaises pour des motifs inconnus.

Selon des sources des Nations-Unies, par le truchement de la MONUC, au stade actuel le total des expulsés s’élève à plus de 43.400 personnes, hommes, femmes et enfants confondus, et les méthodes ne changent pas selon qu’il s’agit d’un homme, d’une femme ou d’un enfant.

Depuis que ces opérations ont commencé jusqu’en ces moments, le gouvernement congolais n’avait jamais protesté contre cette curieuse façon d’agir de son allié, préférant briller par un silence qui sacrifiait ses compatriotes au profit d’un état voisin dont on pouvait déjà percevoir le moindre degré de considérations et de respect accordés aux autorités établies en République Démocratique du Congo qui pourtant, elles, affichaient devant lui un profit trop bas qui donnait l’impression que la RDC ne traite pas d’égal à égal avec son allié.

L’opinion avait été surprise d’entendre, en lieu et place de l’Angola, le gouvernement congolais justifier ces expulsions dont, pourtant, les irrégularités étaient visiblement flagrantes et les nombreux actes de violation des droits de l’homme avaient été dénoncés par des ONG de la région.

En lieu et place d’évoquer les irrégularités et les multiples violations des droits de l’homme pendant ces expulsions, le ministre de l’intérieur Dénis KALUME NUMBI, en bon élève et fidèle serviteur, préférera sacrifier ses concitoyens en faveur de soi-disant « bonnes relations » entre les deux états, assurant ainsi une belle couverture et un dédouanement des autorités angolaises.

2. Confusion à la frontière de Kahemba

carte.jpgFrontalier à la province angolaise de Luanda-Norte autrefois sous contrôle du mouvement rebelle angolais dénommé UNITA de Jonas SAVIMBI, le territoire congolais de Kahemba ne connaît aucune frontière naturelle avec l’Angola, d’où des difficultés à contrôler le mouvement des populations de part et d’autre de la frontière, ce qui favorise la circulation des personnes en situation irrégulière.

Vers les années 80, la rébellion de l’UNITA basée à Luanda-Norte, fort du soutient politique et militaire dont elle bénéficiait de la part du régime Mobutu, n’hésitait pas à franchir la frontière pour exploiter les matières premières à Kahemba, entité par où transitait la logistique militaire en soutien à ses opérations contre le pouvoir de Luanda ; Kahemba servait donc d’arrière base aux opérations militaires de la rébellion de Jonas SAVIMBI. Ces opérations obscures du gouvernement congolais de l’époque et de l’UNITA favoriseront une situation de confusion sur la frontière entre les deux pays au point où les postes frontaliers de contrôle n’y existaient plus.

A la chute du régime Mobutu par le concours du pouvoir d’Eduardo Dos Santos suivie, quelques années plus tard, de l'assassinat de Jonas SAVIMBI, l’UNITA fut fragilisé par des contradictions et divisions internes qui précipitèrent sa défaite devant l’armée régulière qui, vite à son tour, prendra le contrôle de tout le territoire contrôlé par l’UNITA.
Pendant ce temps, rassurés par la sécurité que l’allié venait d’instaurer à la frontière, les gouvernements qui se sont succédés en RDC n’entreprendront aucune initiative pour affirmer l’autorité de l’état sur cette entité frontalière ; on croit savoir qu’il ne s’agissait pas d’une simple négligence mais plutôt une volonté délibérée de faciliter les opérations de ratissage de l’armée Angolaise sur le territoire congolais contre les hommes de l’UNITA qui y avaient trouvé refuge. Malheureusement, cette situation de confusion à la frontière persistera jusqu’en ce moment, ce qui favorise aujourd’hui la mise en exécution des prétentions angolaises dont l’armée était seule à patrouiller dans cette région.

3. Les prétentions territoriales de l’Angola étaient connues

drapeau_angolais.jpgNous avons appris de la Radio Okapi que des sources locales à Kahemba avaient révélé que l’Angola ne serait pas à sa première tentative d’occupation de cette partie du territoire congolais. Un document datant du 9 juillet 1956 fait état d’incidents relatifs à la délimitation de la frontière entre les deux pays à cet endroit. Le commissaire du district du KWANGO de l’époque, M. Carels, avait informé son supérieur hiérarchique, le gouverneur de la province de Léopoldville, de ces incidents. Il indiquait à l’époque que la frontière entre les deux pays se situait dans la région comprise entre les rivières Loange et Lushiko sur le 7e parallèle sud, selon un accord entre les colons belges et portugais. Cette frontière est matérialisée aujourd’hui par les bornes 20, 21, 22 et 23. Bornes qu’ignore la partie angolaise.

A la source de la rivière KAKAMBA en territoire congolais, où est situé le point de commandement de l’armée angolaise, existe un poteau minier placé par des prospecteurs miniers en 1972. Ce poteau signale la présence des richesses minières de cette rivière, a indiqué une source. Alors, la partie angolaise tenterait de transformer actuellement ce poteau en une borne de délimitation frontalière.

Des sources proches des services des renseignements congolais rapportent que ces services avaient fait rapport (qui circulent sur Internet) aux autorités politiques et militaires du pays avec preuve à l’appui des certains faits préparatoires de l’invasion angolaise, c’est, entre autres, le cas des deux rencontres importantes au sein des Forces Armées Angolaises qui se sont tenues d’abord à SAURIMO, Province de Lunda Sud, la tenue du 7e Conseil consultatif du Commandement de la zone aérienne des Forces Armées Angolaises pour l’Est de l’Angola (Lunda Nord et Sud et MOXICO). Le but de l’opération consisterait à évaluer le degré de frappe aérienne par les aéronefs de guerre et préparer les activités combatives des Forces Armées Angolaises. Ces opérations seraient dirigées par le Général de Brigade VIRGINIO PINTO.

Ensuite, la tenue de la 15e réunion méthodologique de l’artillerie terrestre exercice 2007/2008 au Cabinda sous la direction du Chef de l’artillerie des Forces Armées Angolaises, le Général ANTONIO FERNANDES. La réunion aurait duré 3 jours. Ces manœuvres ne seraient pas le fruit du hasard, elles viseraient à soutenir la provocation au Sud de KAHEMBA, et qui risque d’entraîner les deux pays dans un cycle de conflit.

4. Preuve d’amateurisme et de naïveté

denis_kalume.jpgPlusieurs sources auraient procuraient au gouvernement congolais des informations précises sur ce qui se préparaient en Angola par le pouvoir Angolais, mais le gouvernement congolais a fait preuve de négligence par amateurisme jusqu’au point de se fier à des informations non vérifiées qu’il rendra publiques.
Ce sont lesdites informations qui avaient fait état de l’incursion sur le sol congolais de 13 policiers au moment où il s’agissait des plusieurs bataillons voire de brigades. Pourtant la seule fuite des habitants de toutes les localités de ce territoire ne pouvait pas se justifier s’il ne s’agissait que de 13 policiers.

Ce n’est pas pour de besoins de la gestion apaisée de l’opinion publique que le gouvernement congolais a fait fi des informations fiables et vérifiés à la source pour s’en tenir à celles non vérifiées qui pourtant étaient légères. Il s’agit plutôt de la naïveté qui auraient poussé le gouvernement congolais, trop zélé à l’égard de son allié, à faire preuve de trop d’amateurisme en optant pour une information, malheureusement dénuée de tout fondement, qui réconfortait le plus sa position qui écarte l’option de recouvrir aux forces armées en vue de venir à bout de cette invasion étrangère.

5. Des leçons à retenir

Loin de traduire les relations de fraternité entre les deux états ou les deux peuples dits frères et amis, les violences qui accompagnaient ces expulsions des congolais expriment beaucoup plus la détérioration des relations entre les deux états pour des raisons qui restent encore à élucider. Mais l’on croit savoir tout au moins que les prétentions territoriales de l’Angola sur son voisin la RDC y auraient pour beaucoup car l’on comprend mal comment des pays amis dont les relations sont au beau fixe peuvent se déclarer la guerre. Traditionnellement l’on sait que la guerre est la dernière option, le dernier recours pour régler le différend entre les états, on ne pourrait donc pas mentir continuellement les congolais que l’Angola est un pays frère et ami, à moins qu’il s’agisse des amitiés entre individus au pouvoir en Angola et en RDC et non du peuple et de l’état congolais.

kamerhe.jpgL’on ne pourrait condamner le gouvernement congolais sans en faire autant en direction des traditionnels agitateurs du peuple congolais qui se sont toujours cachés derrière un faux nationalisme, un faux patriotisme, et qui ne peuvent voir que les menaces à l’intégrité territoriale de la RDC que présente la présence à Bukavu et à Minembwe des officiers insurgés, pourtant venus pour participer à l’œuvre de pacification de la province ; ces agitateurs ne trouvent, cependant, aucune menace sur l’intégrité territoriale que présente l’invasion du territoire congolais par l’armée angolaise et des déclarations qui confirment clairement les prétentions territoriales de l’état angolais sur la RDC.

Espérons que la RDC survivra à cette dure épreuve qui permettrait au peuple congolais de procéder à un véritable screening afin d’identifier ceux des compatriotes qui sont réellement des vrais patriotes.

La rédaction www.kivupeace.org

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