Le gouvernement coincé dans les embouteillages : les prédateurs pas inquiétés.

Jacques Kimpozo Mayala

17/04/07

mbuta_gizenga.jpgDepuis qu'il s'est inscrit à l'école de la bonne gouvernance, de la transparence, de la lutte contre l'impunité, la corruption et d'autres anti-valeurs, le premier ministre Antoine Gizenga a rendu les Congolais fort exigeants à l'égard de tout ce qui touche à la marche des affaires publiques. Ce que l'homme de la rue attend à présent de lui, ce sont les signaux forts devant marquer la fin réelle du laxisme étatique face aux abus de pouvoir, aux fautes de gestion, aux réseaux mafieux saignant à blanc le trésor public.

Et ce ne sont pas des opportunités de prêcher par la sanction qui manquent. Le week-end dernier, les Congolais étaient tout étonnés d'entendre le porte-parole du gouvernement faire part à l'opinion de sa résolution de ne plus attendre le vote du budget 2007 pour lancer d'urgence des travaux de réhabilitation de la voirie à Kinshasa, avant d'en faire autant pour d'autres grandes villes du pays. Pour d'aucuns, il est regrettable que le Conseil des ministres ait donné l'impression de ne pas s'interroger sur les causes de la dégradation généralisée et cyclique des routes dans la capitale comme dans plusieurs agglomérations urbaines de l'arrière-pays.
Pourtant, personne n'ignore que des fonds colossaux ont été disponibilisés par la Banque Mondiale, tout au long des 36 mois de transition, dans la rubrique de l'aménagement et de la réhabilitation des routes sur l'ensemble de la RDC en général et à Kinshasa en particulier. L'on sait aussi que pour le cas spécifique de Kinshasa, certains chantiers ont nécessité un double voire un triple paiement en faveur de mêmes entrepreneurs, dans une gymnastique propre aux mœurs congolaises : la surfacturation.

Routes de Kinshasa : 3 à 6 mois de vie seulement

Il n'est un secret pour personne que les marchés publics rapportent gros à tous ceux qui détiennent le pouvoir de décision, de la sélection des dossiers d'appels à l'exécution effective des travaux, en passant par les donneurs d'ordre de sortie des fonds et les récepteurs des travaux. En dehors des commissions légales, il se passe des tractations mafieuses en-dessous des tables.
Autant de kilomètres de routes construites ou réaménagées à Kinshasa produisent autant de villas, dans la ville haute, au bénéfice des mafiosi en vestes et cravates. Il n'est plus nécessaire d'être porteur d'un diplôme d'ingénieur en ponts et chaussées pour constater que le bitume posé sur les routes de Kinshasa est d'une maigreur à faire pousser la chair de poule. En fait d'entreprises de construction, on a souvent affaire à d'unités fictives qui naissent à partir des marchés que leur refilent, au mépris des normes d'adjudication, des membres de leurs réseaux. Une fois en possession des millions de dollars générés par un marché public, leurs prétendus propriétaires recrutent, à tour de bras, quelques conducteurs de travaux et maçons sur les places publiques de Kinshasa, prennent à crédit des engins appartenant à des entreprises de construction non sélectionnées et le tour est joué.
En conséquence, les travaux sont très mal exécutés ; les chantiers sont abandonnés à mi-parcours ; ou encore des rallonges de financement sont sollicitées et obtenues pour d'interminables travaux de réhabilitation. Au bout du compte, on se retrouve avec des chaussées complétement dégradées trois ou six mois après leur réfection. Tels sont les cas des chantiers de l'avenue de l'Université, de la bretelle de la 7me rue Limete, de l'avenue Kasa-Vubu de Bandal au centre-ville, des avenues Bongolo, Assosa, Kabambare, Flambeau, Poids Lourds, Libération (ex-24 novembre) à Selembao, etc.
Il n'y a plus, à Kinshasa, une route qui tient le coup plus d'une année après avoir été renouvelée. Quant aux caniveaux non construits ou curés, alors qu'ils sont pris en compte dans les factures des entrepreneurs fantômes, ils ne se comptent plus. L'on se demande qui réceptionne des travaux de voirie réalisés dans un parfait amateurisme dans la capitale.

Les mafiosi à la barre

Le gouvernement Gizenga, au lieu de se précipiter à racler les caisses de l'Etat pour des travaux de voirie qui enrichissent des particuliers au détriment de la collectivité, devrait plutôt demander des comptes à tous ceux qui, après avoir participé à la distribution des marchés publics de la manière que l'on sait, laissent la voirie de Kinshasa et celle d'autres ville du pays dans un état comateux. Le secteur de la construction des routes exige un audit à élargir à tous les réseaux qui, pendant la transition, se sont amusés avec des fonds publics. Au besoin, si l'argent détourné a servi à l'érection des villas cossues en lieu et place des routes d'intérêt public, il n'y aurait d'autre alternative que de les arracher à leurs propriétaires détourneurs. Mais la meilleure manière de décourager de nouveaux candidats à la prédation, c'est de traduire en justice tous les responsables des embouteillages que l'on vit à cause des routes en lambeaux et des caniveaux effacés de la surface du sol. Cidessous, les décisions du Conseil des ministres

Il s'est tenu ce samedi 14 avril 2007, à la Cité de l'Union Africaine, sous la haute direction du Président de la République, Chef de l'Etat, la réunion du Conseil des ministres. L'ordre du jour comportait trois points à savoir:
1. Points d'informations du Premier Ministre,
2. Mise en service de l'Hôpital Général de N'djili,
3. Programme d'extrême urgence de réhabilitation de quelques voiries urbaines.
La communication du Premier Ministre Antoine GIZENGA a été axée autour des directives du Président de la République relatives:
. Au respect de la constitution et des Lois de la République;
. A la culture de la discipline;
. A la poursuite et la finalisation du projet du budget à présenter au Parlement ;
. A la maximisation des recettes;
. A la lutte contre la corruption ;
. A la nécessité de rationaliser les missions à l'extérieur; et
. Au rapport de la mission gouvernementale effectuée à Mbuji-Mayi par une forte délégation conduite par le Ministre d'Etat en charge de l'intérieur, décentralisation et sécurité, accompagné de ses collègues des Mines et de l'Industrie portant sur la situation qui prévaut actuellement à la MIBA.
Le Conseil des Ministres en a pris acte.
S'agissant de la mise en service de l'Hôpital Général de N'Djili, le Ministre d'Etat chargé des Infrastructures, Travaux Publics et Reconstruction ainsi que celui de la Santé ont fait part aux membres du Gouvernement du retard constaté dans le démarrage du fonctionnement de cet hôpital, dix mois après la fin des travaux.
Après échanges de vues, le Gouvernement a instruit le Ministre des Travaux publics, Infrastructures et Reconstruction, ceux de la Santé, de l'Urbanisme et de l'Habitat de prendre, dans les meilleurs délais, des mesures qui s'imposent pour le démarrage effectif du fonctionnement de cet Hôpital.
Quant au dernier point, le ministre d'Etat chargé des Travaux Publics et Infrastructure et Reconstruction a présenté au
Gouvernement un tableau sombre de la voirie urbaine qui se trouve dans un état de délabrement très prononcé à cause de la vétusté de ces structures qui datent de l'époque coloniale.
Il se dégage le constat suivant:
– Le manque d'entretien régulier suite à la non exécution, depuis longtemps, du budget d'investissement et de fonctionnement élaboré par l'Office des Voiries et Drainage (OVD).
– Le non respect de la charge à l'essieu;
– L'accroissement du trafic urbain;
– La limitation de l'enveloppe budgétaire;
– L'accroissement du taux démographique;
– Les constructions anarchiques et
– Les calamités naturelles.
L'état déplorable de ce réseau est à ce jour l'une des principales causes des embouteillages et des difficultés de circulation routière observés ce dernier temps dans les grandes villes à travers la République.
Pour pallier cette situation et en attendant le démarrage des grands travaux, le Gouvernement a instruit le Ministre des TPI d'exécuter sur fond propre le programme de réhabilitation minimale sur quelques axes de la ville de Kinshasa. Ce travail de réhabilitation sera progressivement étendu sur d'autres grandes villes du pays
Commencé à 13h00', la réunion a pris fin à 14h30'
Je vous remercie.
Fait à Kinshasa, le 14 avril2007
Prof. TSHILOMBO SEND Toussaint
Ministre de l'Information, Presse et Communication Nationale,
Porte-parole du Gouvernement

 

Le Phare

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