Le hold-up du “clan Kabila” sur le patrimoine minier congolais.

Amba Wetshi

05/08/07

 

kamoto.jpgDes nébuleuses sociétés étrangères continuent leur hold-up sur le patrimoine minier de la RD Congo avec la complicité tant du « président élu » Joseph Kabila que des membres de sa famille politique et biologique.

Dans la lettre – que d’aucuns qualifient aujourd’hui de testament – adressée aux évêques du Congo-Kinshasa, en date du 30 novembre 2006, le regretté Cardinal Frédéric Etsou, dénonçait non seulement « les différentes stratégies de spoliation totale des richesses de la RDC » mais aussi « l’occupation totale du pays par les étrangers ». « (…), la communauté internationale, s’enrageait-il, veut simplement signifier que « les contrats juteux ont été déjà signés ! Désormais, coltan, cobalt, uranium, cuivre…or, diamant, bois, mercure congolais et j’en passe, sont propriétés des Asiatiques, des Occidentaux, des Africains etc. ».

 

Dans son édition en ligne datée du 3 août, l’hebdomadaire belge « Trends Tendances » (www.trends.be) publie sous la plume de son spécialiste-maison Erik Bruyland, un article intitulé : « Guerre sans merci dans les mines congolaises ». Notre confrère annonce en liminaire que deux groupes financiers, Camec (Central African Mining and Exploration Company) et Nikanor « se livrent à une lutte acharnée ». Le premier a pour actionnaire principal le très controversé Zimbabwéen blanc Billy Rautenbach. Celui-ci serait associé à Janet Kabila, la propre sœur du numéro un Congolais. Le diamantaire Israélien Dan Gettler – proche de Joseph Kabila et de son bras droit Augustin Katumba Mwanke – trônerait dans le second groupe. Quelle est la pomme de discorde ? Rien moins que le contrôle de la société Katanga Mining Limited (KML), un groupe minier coté sur la Bourse de Toronto, détenu à 24% par l’homme d’affaires belgo-néozélandais Georges Arthur Forrest.

Kamoto

Pour la petite histoire, la KML a acquis dans les conditions que l’on peut imaginer la mine souterraine de Kamoto. Cet ex-fleuron qui permettait à l’entreprise d’Etat Gécamines de tirer, avant l’éboulement de 1992, plus de 20% de sa production en cuivre et cobalt. Ancien patron de la Gecamines sous Kabila père, Rautenbach a cessé d’être en odeur de sainteté à la Présidence de la République. Forrest ferait également l’objet d’un certain ostracisme. Hier fâchés, Billy et Georges seraient devenus les meilleurs alliés du monde. A en croire « Trends », Billy a accumulé, via la Camec, 22% du capital de KML. « Une association Camec/KML, écrit le magazine, représenterait un cinquième de l’offre mondiale de cobalt ». Le tandem pourrait ainsi s’emparer de son rival Nikanor, « véhicule boursier » des diamantaires Gettler et Benny Steinmets, qui a pris le contrôle de la mine à ciel ouvert KOV, située à un jet de pierre de Kamoto. Selon « Trends » toujours, « l’entourage présidentiel » a fait savoir à Rautenbach et à Camec qu’ils « feraient mieux » de renoncer à leurs ambitions de s’emparer de KML. Forrest, lui, aurait été invité à laisser Nikanor reprendre KML. Est-ce en guise de représailles que Rautenbach a été expulsé du pays en dépit de l’opposition manifestée par « Janet » ? Selon notre confrère belge, Forrest et Rautenbach seraient l’objet d’une campagne de « dénigrement » à Kinshasa. Selon des sources contactées par la rédaction de Congoindependant, depuis la prestation de serment du « président élu », le « clan kabiliste » ne cache plus sa volonté de s’accaparer le secteur minier du pays.

Campagne électorale

Pour mémoire, les 5 millions de dollars U$ versés l’année dernière, par la société De Beers, à la MIBA au titre de droits superficiaires ont pris une destination connue uniquement de l’ancien président administrateur délégué Gustave Luabeya Tshitala. Selon certaines sources proches de la Minière de Bakwanga, cet argent a pu servir notamment au financement de la campagne électorale de Joseph Kabila. Selon un expert, après l’investiture de Kabila, son bras droit Augustin Katumba Mwanke a placé « ses hommes de main » à la tête des entreprises publiques du secteur minier. C’est le cas notamment de la Gécamines (Cuivre, Cobalt, Zinc), de l’OKIMO (Or) de la MIBA (Diamant) et du CAMI (Cadastre minier). « Pour assurer la bonne exécution de ses injonctions, Katumba a fait propulser, à la tête du ministère du Portefeuille, Madame Jeannine Mabunda Mudiayi Lieko, proche du gouverneur de la Banque centrale Jean-Claude Masangu », enchaîne une source bien informée. « Le cabinet du ministre du Portefeuille est truffé des fidèles à Katumba », ajoute-t-elle soulignant au passage que le ministère des Mines serait tout aussi « sous contrôle » de l’homme fort du clan kabiliste à travers notamment le vice-ministre Victor Kasongo Shomari, ancien ADG de l’OKIMO et du CEEC (Centre d’expertise en diamant). Selon un haut fonctionnaire joint au téléphone à Kinshasa, un rapport du Cadastre minier relatif aux gisements devant faire l’objet d’un appel d’offre révèle que le plus grand gisement de bauxite dans la province du Bas-Congo « a été donné » gracieusement à la société « ACACIA », ex Grand Congo.

Kilwa

Le propriétaire de celle-ci ne serait autre que des membres de la famille biologique de Joseph Kabila. Rappelons que Katumba Mwanke est un des administrateurs de la société Anvil Mining, impliquée dans une affaire de massacre d’une centaine d’habitants de la localité de Kilwa au Katanga. Le procès ouvert sur cette tuerie massive bute à des pressions politiques. Janet Kabila, elle, est l’associée de Billy Rautenbach dans Camec. Dans une lettre datée du 29 janvier 2006, cette dernière société écrivait à l’administrateur délégué général (ADG) de la Gécamines lui proposant de conclure un partenariat pour exploiter le gisement d’uranium de Shinkolobwe. Etrangement, la correspondance a été traitée par l’ADG adjoint de l’époque, Calixte Mukasa Kalembwe, à l’insu de l’ADG Paul Fortin. Toute aussi étrange, Mukasa s’est cru en droit de saisir directement le président de la République en réservant copie à son ministre de tutelle…Le ministre d’alors, Ingele Ifoto, dira tout le mal qu’il pensait de ce projet. Selon African Mining Intelligence, Paul Fortin, l’actuel ADG de la Gécamines, recruté par le cabinet conseil français Sofreco, dans le cadre d’un contrat avec la Banque mondiale, « s’est émancipé ». L’homme aurait désormais des « protecteurs » au sein de l’entourage présidentiel. Il avait reçu mandat de la Banque mondiale pour restructurer cette entreprise publique.

B. Amba Wetshi
© Congoindépendant 2003-2007

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