Rwanda: les extrémistes hutus responsables de l’attentat contre Habyarimana (Kigali)

AFP

06/01/10

 

juvenal_habyarimana.jpgLa frange extrémiste du regime hutu rwandais est responsable de l'attentat qui coûta la vie le 6 avril 1994 au président rwandais Juvénal Habyarimana, selon les conclusions de l'enquête rwandaise sur cet événement considéré comme le déclencheur du génocide.

Un "comité indépendant", présidé par Jean Mutsinzi et créé en avril 2007 par le gouvernement rwandais, conclut à la responsabilité de haut gradés des Forces armées rwandaises (FAR) dans cet attentat décrit comme le premier acte d'un "coup d'Etat" militaire destiné à empêcher tout partage du pouvoir avec la rébellion tutsi du Front patriotique rwandais (FPR – actuellement au pouvoir).

"Le comité a passé au crible les différentes hypothèses et a fini par être convaincu que la responsabilité des ex-FAR est pleinement engagée dans la préparation et l'exécution de l'attentat qui a coûté la vie aux présidents Habyarimana et (Burundais Cyprien) Ntaryamira, à l'équipage français du Falcon 50 et aux passagers rwandais et burundais qui l'accompagnaient", selon le rapport, dont l'AFP s'est procuré une copie.

 

 

 

Le soir du 6 avril 1994, l'avion transportant notamment MM. Habyarimana et Ntaryamira avait été abattu en phase d'atterrissage à Kigali par des missiles sol-air.

Habyarimana, un Hutu, était de retour de Dar es-Salaam (Tanzanie), où il avait participé à un sommet consacré notamment au processus de négociations avec la rébellion du FPR.

A l'appui de la thèse d'une implication d'extrémistes hutus, le comité souligne que "la position prise par le président Habyarimana (…) d'appliquer les Accords d'Arusha ne pouvait aboutir qu'à la mise à l'écart évidente de plusieurs ténors des FAR, parmi les plus extrémistes".

"Sur le plan technique, (…) selon les informations versées au domaine public par les révélations des FAR elles-mêmes, celles-ci disposaient de missiles sol-air qu'elles disent avoir récupéré sur le FPR en 1991, et avaient, si ce fait est avéré, les moyens de commettre l'attentat", poursuit le rapport.

"Les tenants de cette thèse précisent aussi que la zone de tir présumée était sous le contrôle effectif des FAR et que l'infiltration (d'éléments de la rebellion) n'était pas quelque chose de faisable", ajoutent ses auteurs.

Le comité rwandais ne retient pas une responsabilité de la France dans l'attentat, mais insiste sur le fait que des militaires francais en poste au Rwanda dans le cadre de la coopération militaire avec le régime d'Habyarimana avaient eu accès à l'épave de l'avion le soir de l'attentat et dans les jours qui ont suivi, emportant avec eux, selon le comité, la boîte noire de l'appareil et des débris d'un missile.

L'enquete rwandaise donne une version diamétralement opposée de celle soutenue par une enquête judiciaire francaise confiée dans un premier temps au juge antiterroriste Jean-Louis Bruguière, qui mettait en cause la responsabilité de la rebellion du FPR dans l'attentat. Le juge Bruguière avait lancé en novembre 2006 des mandats d'arrêt contre neuf responsables de l'actuel regime rwandais, entraînant une rupture des relations diplomatiques entre les deux pays.

Paris et Kigali ont annoncé la reprise de leurs relations le 29 novembre et le ministre français des Affaires étrangères Bernard Kouchner effectue jeudi sa première visite au Rwanda depuis cette annonce.

"C'est une contribution extraordinaire. On a fait côté rwandais le travail que n'importe quel magistrat devrait faire: aller sur le terrain voir les gens qui ont vu ce qui s'est passé", a réagi auprès de l'AFP Bernard Maingain, avocat de Rose Kabuye, directrice du protocole du président Paul Kagame et seule mise en examen dans l'enquête judiciaire francaise.

 

AFP

Leave a Reply